Le 1er octobre 2019, le Sénat a adopté une proposition de loi destinée à réprimer les entraves à l’exercice des libertés ainsi qu’à la tenue des évènements et à l’exercice d’activités autorisées par la loi.
Selon ses promoteurs, ce texte (déjà déposé en novembre 2018, mais retiré eu égard aux risques d’amalgame qui pouvait être fait avec le mouvement des Gilets Jaunes) entendait réprimer les actions militantes en soutien à la cause animale contre l'activité de la chasse ou d'inspiration « vegan » contre des boucheries, des abattoirs ou des élevages.
Pour ce faire, les sénateurs ont élargi le champ de l’article 431-1 du Code pénal sanctionnant l’entrave à l'exercice de la liberté d'expression, du travail, d'association, de réunion, de manifestation. Lors des débats, les actions telles que les « blocus, interruptions de représentations, des invasions de terrains rendant impossible pour les élèves l’accès à leur établissement, les actions qui empêchent des commerçants de vendre leurs produits, des consommateurs d’en acheter, ou encore des spectateurs d’assister à un spectacle » ont été clairement visées. Et même si ces éléments n’ont pas été repris dans le texte voté et adopté en dépit de l'opposition affichée du gouvernement, il y a clairement danger.
Le vote du Sénat aura donc rajouté à l'article précité le fait que le délit d’entrave pourra être caractérisé par des « actes d’obstruction ou d’intrusion ». De même, il a été créé une nouvelle catégorie d’entrave relative à « l’exercice d’une activité commerciale, artisanale ou agricole exercée dans un cadre légal ».
Outre qu'il concourt à une inflation textuelle car des faits repris dans l’exposé des motifs entrent dans le champ d'autres textes répressifs, il est un souci majeur. En effet, il s’agit une fois de plus d’empêcher les luttes et l'expression des revendications en judiciarisant des actes et expressions militants. Au motif de protéger certains intérêts particuliers comme le lobby de la chasse, il ouvre la porte à la pénalisation des actions revendicatives telles que piquets de grève, blocus, action BDS... ce qui ne déplairait certainement pas au gouvernement. L'exemple du retour de la loi anticasseurs sous les traits de la loi anti-manifs du 10 avril dernier est suffisamment là pour nous alerter.
Ce texte est désormais entre les mains des parlementaires de l'Assemblée nationale.