Depuis fin octobre 2021, trois grèves de travailleurs sans-papiers ont démarré successivement. Ils ont installé des piquets devant leurs entreprises : la plateforme de DPD (filiale de La Poste) du Coudray-Montceaux, l’agence Chronopost d’Alfortville, et l’agence d’Intérim RSI de Gennevilliers.
La principale revendication dans ce conflit du travail est la régularisation de l’ensemble des travailleurs en lutte sur ces 3 piquets dans le cadre d’une négociation collective.
Ces travailleurs intérimaires subissent depuis des années une surexploitation qui fait système, par des entreprises qui recherchent les travailleurs sans titre par suite de la dégradation extrême des conditions de travail qu’ils ont imposées à leurs salariés.
La Poste, patron de combat contre les sans-papiers !
➢ Les Postiers sans-papiers se heurtent à un refus total de La Poste de reconnaitre ses responsabilités d’employeur dans le système de sous-traitance en cascade mis en place dans ses filiales colis et logistique, comme à Chronopost Alfortville ou DPD au Coudray-Montceau : chantiers et traitement des colis sous-traités par exemple à Derichebourg, qui lui-même sous-traite à des boites d’intérim, dont la sienne propre (Derichebourg Intérim) ! Ajoutons que cela se fait avec des contrats de mission systématiquement d’une semaine, alors qu’il s’agit de postes pérennes.
Au bout de cette chaîne, il y a l’exploitation éhontée de travailleurs sans-papiers, obligés de bosser avec des horaires de dingues, incompatibles avec l’usage des transports en commun, dont les heures supplémentaires (voire même une partie des heures tout court) ne sont pas payées, et dont les missions sont interrompues dès qu’ils ne peuvent suivre le rythme ou qu’ils réclament leurs droits.
Depuis 19 mois, les travailleurs en lutte et leurs soutiens multiplient les mobilisations devant les sièges des directions de La Poste et de ses filiales, pour exiger que ces patrons sans vergogne assument leurs responsabilités de donneurs d’ordre !
Cette lutte, à Alfortville, a pris le relais de celle commencée en juin 2019
➢ Pendant 7 mois, de juin 2019 à janvier 2020, une lutte devant l’agence Chronopost d’Alfortville, avec un piquet installé jour et nuit, avait permis d’imposer la régularisation de 27 travailleurs surexploités par cette filiale de La Poste et ses sous-traitants, Derichebourg et Mission Intérim. Cela a permis aussi la régularisation de 46 autres travailleurs, d’autres sociétés, ayant activement participé à ce combat. Mais, à la faveur de la crise sanitaire et du confinement, la Préfecture du Val-de-Marne est revenue sur ses engagements de suivre les dossiers d’autres travailleurs ayant eux aussi participé à cette lutte, dont 83 ne sont toujours pas régularisés, et poursuivent donc le combat dans le conflit actuel.
➢ Dans leur lutte, les actuels salariés de Chronopost comme les anciens du piquet de 2019 ont reçu le renfort de nombreux travailleurs sans-papiers d’autres entreprises, présents depuis 19 mois sur le piquet et dans les manifestations, pour exiger aussi leur régularisation.
Le Gouvernement doit régulariser !
La responsabilité du gouvernement, en particulier en ce qui concerne la Poste et ses filiales, est totalement engagée ! Comme actionnaire de référence de cette entreprise dont il contrôle le capital aux côtés de la Caisse des dépôts et consignations (CDC), l’Etat n’ignore rien du système d’exploitation mis en place depuis des années !
Le ministère du travail, qui a reçu une délégation des travailleurs en lutte à deux reprises, connait parfaitement la situation et les responsabilités des sous-traitants et donneurs d’ordre. Mais pas plus qu’il y a deux ans, les services du ministère du travail dans le Val-de-Marne n’ont mené de véritable enquête sur l’exploitation des sans-papiers à Chronopost Alfortville, et couvrent de fait la Direction de La Poste. Quant au ministère de l’intérieur, où nous avons de nombreuses fois manifesté et sollicité des audiences, c’est silence radio concernant ces filiales de La Poste !
La préfecture reçoit enfin, mais joue la division !
➢ La préfecture du Val-de-Marne, après 18 mois de silence et de refus, a enfin reçu une délégation du piquet Chronopost au mois de mai. Quelques dossiers ont été déposés en préfecture et sont en attente de réponse.
Par contre, la préfecture refuse à ce jour tout nouveau dépôt collectif de dossiers des autres travailleurs en lutte sur le piquet. Il ne peut être question pour les travailleurs mobilisés d’accepter cette manœuvre de division, et la lutte continue donc pour la régularisation de tous les occupants du piquet.
Dans un contexte où Macron et le ministre de l’intérieur, Darmanin, appellent à un durcissement insupportable de toutes les conditions d’accueil et de séjour des migrant-es, les travailleurs en lutte présents sur les piquets, avec leurs soutiens, sont plus que jamais déterminés à obtenir leur régularisation !